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Christiane Desroches Noblecourt

Il y a des femmes exceptionnelles qui sont capables de déplacer des montagnes… littéralement !

Dans les années 1950, face aux besoins croissants d’électricité, le gouvernement égyptien acte la construction du barrage d’Assouan. Même si cela implique l
a disparition de dizaines de temples antiques, qui seront engloutis... C’est un mal nécessaire, pense-t-on alors.

Mais pour Christiane Desroches-Noblecourt, la conservatrice en chef des antiquités égyptiennes du Musée du Louvre, c’est absolument impensable. Parmi les temples concernés, il y a Abu Simbel, érigé par Ramsès II 1200 ans avant notre ère :
impossible de laisser ce chef-d’œuvre du patrimoine mondial disparaître sous les eaux.

La voilà qui dépense des trésors d’énergie pour tenter de convaincre le gouvernement égyptien de ne pas se satisfaire de cette perte terrible. Mais elle semble bien seule à le penser :
en butte à l’indifférence, au scepticisme et au défaitisme, elle persiste.

Car elle en a vu d’autres ! De la persévérance, il lui en a fallu pour se tailler une place dans le milieu très sexiste de l'archéologie française. En 1938, alors
première femme nommée à l’Institut français d’archéologie orientale, l'égyptologue se souvient de ses collègues indignés à la seule idée de partager la bibliothèque avec elle, et qui prédisent son évanouissement et sa mort dès sa première sortie sur le terrain (rien que ça).

C’est bien mal la connaître.
Membre de la Résistance, elle a mis à l’abri les Antiquité égyptiennes du Louvre. Arrêtée et interrogée par les nazis, elle a sèchement remis à leur place ses geôliers, en leur reprochant leur manque de bonnes manières. Aussi, ce n’est pas un gouvernement égyptien résigné qui risque de l’arrêter.

Après des mois de lobbying, elle est rejointe dans son combat par l’Unesco et par le ministre de la culture égyptien, qui parvient à convaincre le président Nasser. Et grâce à l’entremise de Jackie Kennedy, qui de son côté obtient du Congrès américain de débloquer des fonds, d’autres nations mettent la main au portefeuille : en tout, une cinquantaine de pays rassemblent 80 millions de dollars de l’époque, ce qui en fait
un exemple inédit de coopération internationale (dans un contexte politique pourtant très tendu).

Commence alors un chantier dont l’ampleur et la complexité dépassent l’entendement. Il faut déplacer, bloc par bloc, le temple et son flanc de montagne 65 mètres plus haut. Comme un Lego pour géants, Abu Simbel est tronçonné en morceaux d’une vingtaine de tonnes et déplacé, sans nuire à son intégrité.
Aujourd'hui, c'est grâce à la pugnacité de cette femme que nous pouvons encore l'admirer.

Pour 2024, je vous souhaite d’avoir ne serait-ce que le 10e de l’énergie de Christiane Desroches-Noblecourt : puissiez-vous déplacer des montagnes et faire naître des coopérations inédites, qu’importe les obstacles qui entravent votre route !

Initialement publié sur LinkedIn le mardi 2 janvier 2024

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